« Elle ressemblait à un voyage, ou plus précisément à ce moment du voyage où, encore loin de la destination envisagée, tous les repères familiers et les habitudes se sont effacés, dilués à un point tel que l’on doute de leur existence. C’est un temps de flottement, d’incertitude, mais aussi de ravissement, de curiosité et de totale disponibilité. Nous habitons une poignée de mots. »
Gaëlle Josse in Nos vies désaccordées
Mois : juillet 2015
Markus Orths : « Femme de chambre »
Présentation de l'éditeur : Femme de chambre dans un hôtel, Lynn y satisfait sa manie obsessionnelle du nettoyage. Même les affaires personnelles des clients font l'objet d'une inspection approfondie et indiscrète. Un soir, dans la chambre 303, la jeune fille enfile par-dessus son tablier le pyjama du client, et lorsque ce dernier tourne la clé dans la serrure, il ne lui reste qu'à se glisser sous le lit. La nuit qu'elle y passe constitue un pas de plus dans l'intrusion amorcée. Un pas qui va la mener très loin...
Femme de chambre brosse le portrait d’une femme lentement dévorée par l’obsession des autres, une femme qui cherche à savoir comment ils réussissent là où elle échoue: vivre. Markus Orths entraîne insensiblement son lecteur dans l’univers psychologique de Lynn, l’absurde devient normalité, et la perversité de l’héroïne s’impose à l’esprit du lecteur avec une simplicité enfantine.
Femme de chambre est un court roman d’un auteur allemand de la quarantaine : Markus Orths.
Chut c’est un secret avec Jérôme Attal
Jérôme Attal est un écrivain, parolier, scénariste et crooner rock. Il manie les mots avec douceur et originalité dans tous ses projets. Le voyage près de chez moi et Presque la mer sont deux romans que j’ai particulièrement appréciés pour la poésie qu’ils dégagent. Son dernier roman Aide-moi si tu peux joue avec les codes du roman policier et nous plonge dans les années 80. J’ai rencontré Jérôme lors de sa venue à la Médiathèque de la Robertsau où nous avons partagé une excellente interview ensemble. Si vous voulez lui faire plaisir, offrez-lui une BD de Calvin & Hobbes! Merci à lui pour ses réponses!
Citation de le semaine
68 premières fois
Charlotte Milandri du blog L’insatiable, a lancé un très joli projet pour la rentrée littéraire de septembre 2015. Le défi fou de lire, chroniquer et promouvoir les 68 premiers romans qui rentrent cette année dans le grand bain littéraire. J’y retrouve d’une blogueuse amie Céline Huet qui tient le blog Arthémiss et Sabine Faulmeyer qui anime le blog du Petit carré jaune.
Amoureuse des premières fois (nostalgique aussi) je ne pouvais que rejoindre cette folle aventure qui réunit une trentaine d’autres passionnés!
Vous retrouverez les chroniques du groupe sur le site lecteurs.com et sur mon blog avec la catégorie « 68 premières fois »
Aude Le Corff : « L’importun »
Présentation de l'éditeur : "Une nouvelle maison, pleine de charme, qui se révèle inquiétante. L’ancien propriétaire ombrageux qui s’impose. Lorsque la narratrice emménage avec son mari et ses enfants, elle n’imagine pas que sa vie va étrangement basculer. Quels souvenirs hantent le vieil homme ? Quelle réparation cherche-t-il auprès d’elle ? De quelle mémoire les murs de la maison sont-il les gardiens ? Aude Le Corff livre un second roman subtil, qui sonde les fragilités de l’âme humaine et s’interroge sur les stigmates de l’Histoire."
Aude Le Corff signe un deuxième roman plein de maturité abordant tour à tour le destin d’une femme d’aujourd’hui, avec une délicieuse mise en abîme puisqu’il s’agit d’une écrivaine, et l’histoire de Guy, le vieil homme, à qui appartenait la maison qu’elle vient d’acquérir avec son mari.
Guy est intriguant pour la jeune romancière mais aussi pour la femme au père absent. Il vit dans une petite maison de retraite à quelques pas de son ancienne maison. Il ne peut s’empêcher d’y revenir malgré les nouveaux occupants. Dans le secret des matinées d’écriture de la jeune femme, ils vont nouer une relation qui les grandira chacun.
« Souvent j’ai la tête ailleurs. Lorsque j’écris je suis sourde à mon environnement, je me retranche dans un monde que je redessine à ma façon. Tout devient permis (…). »
La mémoire des murs va-t-elle permettre, malgré tout, à la petite famille de prendre possession de la maison ? L’ancien propriétaire va bien vite passer de l’importun à l’incontournable. Ces deux personnages écorchés vont finalement se réparer et avancer chacun sur le chemin de la reconstruction.
« Les jours suivant, on prend nos pauses ensemble, on se retrouve dans le jardin avec un verre de jus de raisin, et on se répartit la pile de « Chasseurs français ». Chacun sélectionne les petites annonces hommes/femmes les plus cocasses, on se les lit à tour de rôle en persiflant, et je crois bien qu’en ces moments légers, nous ne sommes plus dans ce rêve flou qui nous échappe, duquel nous essayons de nous extraire en écrivant, en bricolant, mais dans une réalité vivante plus simple et riante. »
Un roman a la douce ambiance bretonne sur ces moments de bascule dans la compréhension de soi et des autres.
Aude Le Corff, L’importun, Stock, avril 2015, 198 pages, 17.50 euros