Présentation de l'éditeur : « Moi, monsieur, je suis pleine du bruit assourdissant de vivre. »
En détention on l'appelle la Petite Barbare ; elle a vingt ans et a grandi dans l'abattoir bétonné de la banlieue. L'irréparable, elle l'a commis en détournant les yeux. Elle est belle, elle aime les talons aiguilles et les robes qui brillent, les shots de vodka et les livres pour échapper à l'ennui. Avant, les hommes tombaient comme des mouches et elle avait de l'argent facile.
En prison, elle écrit le parcours d'exclusion et sa rage de survivre. En jetant à la face du monde le récit d'un chaos intérieur et social, elle tente un pas de côté. Comment s'émanciper de la violence sans horizon qui a fait d'elle un monstre ? Comment rêver d'autres rencontres et s'inventer un avenir ?
La Barbare est un bâton de dynamite rentré dans la peau d'une société du néant. Un roman brut et stupéfiant.
Astrid Manfredi a créé le blog de chroniques littéraires « Laisse parler les filles ». Elle intervient ponctuellement pour le Huffington Post, toujours autour de la littérature. « La Petite Barbare » est son premier roman.
Encensé par François Busnel fin août et porté par une presse dithyrambique, La petite barbare n’a pas volé son succès. Astrid Manfredi signe un magnifique premier roman autour d’une jeune fille à la beauté insolente, à la violence cachetée dans un corps qui ne sait plus aimer, à la recherche d’un avenir entre les barreaux non pas d’une seule, mais de plusieurs prisons. Saura-t-elle trouver la clé de la liberté ?
« Je ne suis née belle à pleurer un jour de grand froid et d’arbres morts, de parents enterrés avant d’avoir commencé. Ils m’ont légué leur vie, leurs mauvais films et leurs fins de mois difficiles. Il paraît qu’on peut en guérir. C’est loin d’être sûr. »
Celle qui n’a pas de nom et que l’on désigne par la périphrase la petite barbare est née en banlieue d’une mère alcoolique et d’un père absent. La cité dans laquelle elle évolue est un monde à part aux codes qu’elle déchiffre, qu’elle apprivoise. Sa beauté est un passe partout dangereux. Les rencontres font et défont les existences. C’est la rencontre d’Esba qui va la faire basculer du côté d’un gang où la violence attend tapie l’explosion de rage de vivre et de tuer…
« Oui, voilà ce que nous sommes, de grands fauves qui se gavent d’ultraviolence pour encaisser l’ineptie d’un monde fabriqué sans notre avis. »
La langue de cette jeune auteure est vive, inventive, vraie. Tout en rupture et en exploration littéraire, elle enchante par sa créativité et son audace. J’ai eu l’impression d’entendre du slam tant son texte est scandé, rythmé.
« Je m’en fous de respirer, je veux mourir essoufflée. Du bruit et de la fureur, voilà ce qui germe dans le coeur de mon coeur. Ca gronde, c’est un orage et aucun présentateur météo ne pourra prédire où il va s’abattre. »
L’autre point fort de ce roman est la présence de Marguerite Duras à travers l’évocation de son best seller L’amant. Bien plus qu’une caution littéraire, cette intertextualité apporte profondeur et réflexion, sensualité et créativité. La petite barbare qui fréquente le bibliobus de sa cité, trouve dans les livres une formidable raison d’exister différemment et de croire en l’avenir.
« Moi, mon mirage est indochinois et il a la classe des mots de Marguerite, cette langue qui fait du bien et du mal, qui s’enroule comme un cobra autour de votre âme pour ne plus jamais la quitter. Précise et folle, dangereuse et amoureuse, telle est ma Marguerite égarée sur le Mékong de son enfance éternelle, brisant les barrages de bêtise entre elle et le monde. Moi, y a aucun fleuve au pied de ma tour. Mais j’ai besoin de flotter. Juste un peu. »
Un premier roman qui signe l’émergence d’une nouvelle voix de la littérature française et suscite déjà l’impatience d’une prochaine publication.
Astrid Manfredi, La petite barbare, Belfond, août 2015, 160 pages, 15 euros
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