Présentation de l'éditeur : "Les évaporés Ici, lorsque quelqu'un disparaît, on dit simplement qu'il s'est évaporé. Personne ne cherche à le retrouver, pas de crime pour la police, honte et silence du côté de la famille. Sans un mot, Kase un soir a disparu. Comment peut-on s'évaporer si facilement sans laisser de trace ? Et pour quelles raisons ? C'est ce que cherche à comprendre Richard B., venu au Japon afin d'aider Yukiko à retrouver son père. Pour cette femme qu'il aime encore, il mène l'enquête dans les quartiers pauvres de Sanya à Tokyo. Ce roman profondément poétique allie découverte du Japon, encore bouleversé par la catastrophe de Fukushima, et réflexion sur notre désir, parfois, de prendre la fuite."
Thomas B. Reverdy est un auteur à l’univers généreux et à la dimension mondiale.
Les évaporés est roman entre Japon et Etats-Unis qui aborde un phénomène de société dramatique au pays du soleil levant : la disparition volontaire d’adultes. Il a été distingué par le Prix Joseph Kessel 2014.
« Il faut que vous sachiez d’abord qu’ici, au Japon, un adulte a légalement le droit de disparaître.
– Il n’y a pas d’enquêtes de police.
– C’est comme une fugue. On dit yonige, ça veut dire « fuite de nuit ». Dans le fond, c’est une sorte de déménagement, mais sans laisser d’adresse. »
Le « monde flottant » désigne au japon une catégorie de personnes : les exclus de la société, les prostituées, les marginaux, les drogués, les brigands, les paumés en tout genre et les personnes disparues, appelées aussi les évaporés. Ils ne font pas l’objet d’une enquête de police, car il n’y a pas de corps à rechercher et les proches ne l’ébruitent pas car cela jette le déshonneur sur la famille. Un an après la catastrophe de Fukushima, Kaze, un homme japonais proche de la retraite, disparaît subitement afin de ne pas affronter le regard de ses proches suite à son licenciement de la banque où il gère de très gros portefeuilles.
« Il savait que parfois, pour survivre, il faut partir. Ce qui veut dire aussi qu’il faut laisser les gens partir. Même ceux qu’on aime. »
S’en suit une longue fuite dans le monde des marginaux, à survivre de petits boulots à la journée, à regarder dans les yeux la tristesse et la violence humaine.
« Les soupçons c’est une chose…Mais les images, la certitude, la vérité. Comment font les gens pour vivre avec la vérité ? »
Thomas B. Reverdy trouve par une habile construction littéraire, le moyen de faire découvrir à son lecteur, tout cette réalité par les yeux des non initiés, d’un occidental : le vieux et ancien petit ami de sa fille Yukiko, Richard B.
« Les mauvaises raisons d’agir avaient toujours le même nom et Richard le connaissait par cœur : c’était l’espoir. La face cachée des probabilités »
Dès lors qu’ils reviennent tous les deux des Etats-Unis, ils n’ont cessent de mener l’enquêter pour retrouver ce père, disparu volontaire. Ce sera un très belle plongée dans les traditions et l’art de vivre japonais.
« C’est tout le Japon moderne qui n’est qu’un reflet affaibli de l’ancien. Les gens disent que c’est propre à Kyoto, comme si c’était une sorte de sentiment illusoire et honteux, de l’orgueil ou de la nostalgie, alors que c’est une évidence qui est seulement plus visible ici. Le passé est éternel, c’est le présent qui passe, c’est le présent qui fuit, qui s’efface. »
J’ai été conquise par ce roman au charme mystérieux, à l’écriture délicate et ciselée qui évoque un fait de société méconnu en occident. Laissez-vous envouter par la poésie et l’univers feutré de Thomas B. Reverdy.
L’offrir à : des ami(e)s, des ados, des passionnés d’histoire et de faits de société, des voyageurs dans l’âme.
Thomas B. Reverdy, Les évaporés, J’ai lu, mai 2015, pages, 7,20 euros