Présentation de l'éditeur : "« Face à la vie, elle avait la même impression que lorsqu’elle regardait le paysage défiler par la fenêtre du train : si elle
était dans le sens de la marche, le panorama semblait se jeter sur elle, et ses yeux affolés ne savaient à quel détail s’attacher ni quelle ligne suivre. Elle se sentait écrasée par l’image qui ne tenait pas en place, ne cessait de se
transformer. Assise en sens inverse, elle retrouvait son calme et contemplait
l’horizon jusqu’à sombrer dans le sommeil. Alors… alors, songeait-elle,
peut-être pourrait-on dire que c’est la même chose lorsqu’on regarde soit en
direction de l’avenir, soit vers le passé. Peut-être est-ce pour cela que j’ai tant besoin de mes souvenirs. » Née à l’aube du XXe siècle, Rose débarque à Paris à 20 ans et se trouve projetée dans un univers totalement inconnu. L’affaire Dreyfus, puis la guerre de 14 éclatent. Les années folles se succèdent. Les
bas-fonds, la vie de bohème, la solitude... Rose risque à tout moment de
tomber."
Agnès Desarthe est romancière, elle a publié notamment : Un secret sans importance (prix du Livre Inter 1996), Dans la nuit brune (prix Renaudot des lycéens 2010) ou encore Une partie de chasse, ainsi que de nombreux ouvrages pour la jeunesse.
Pour cette rentrée,elle revient avec un roman profondément romanesque, une épopée littéraire comme on en lit rarement.
Rose une jeune fille de bonne famille, élevée entre un père soumis à l’autorité de sa femme et une mère complètement déjantée. Heureusement, sa nourrice aux allures de force de la nature est là pour veiller un tant soit peu sur elle.
Après avoir vécue au Danemark, en Afrique et dans la proche banlieue de Paris, elle s’émancipe tant moralement que physiquement de ses parents pour partir vivre à Paris. Agnès Desarthe décrit avec tendresse, les aventures de cette grande naïve dans une ville où Rose va perdre tous ses repères. De rencontres en mensonges, elle traverse les premières années de 1900 avec désillusion et passion grâce à sa beauté particulière et curieusement, sa volonté de ne pas s’engager.
« Rose se marierait-elle un jour? Elle ne parvenait pas à imaginer la chose. Un homme, auprès d’elle, jour et nuit, dans son lit avec elle, qu’elle devrait servir, dont elle dépendrait, qui la connaîtrait, l’appellerait mon épouse, ma femme, comme on dit « mon chapeau » ou « mon chien ». »
Après quelques péripéties dans une fumerie d’opium, elle est sauvée in extremis par une femme qui aura le mérite de la remettre sur pieds et de l’aimer du mieux qu’elle le peut. Alors que le féminisme bat son plein et que l’on sort à peine de la guerre, une histoire particulière se tisse entre ses deux femmes.
L’Histoire est habillement mêlée au destin de Rose qui n’en finit pas de rebondir encore et encore après des pages de suspens. Un roman dont on tourne voracement les pages, touché par la plume juste et sensible de l’auteure. J’ai aimé les portraits de femme, tous différents mais avec pour dénominateurs communs : la soif de vivre, d’être libre et d’aimer.
A noter le titre fait référence au poème « Marie » d’Apollinaire.
L’offrir à : des ami(e)s, des ados, des romantiques.
Agnès Desarthe, Ce cœur changeant, L’Olivier, août 2015, 336 pages, 19,50 euros (article initialement publié ici)