Présentation de l'éditeur : "Qu’avons nous fait de nos rêves ? Que sont nos amis et
nos amours devenus ? Ouessant. Accoudé à l’embarcadère, un homme scrute la ligne
d’horizon.
Dans quelques instants, le ferry va se dessiner dans le lointain et lui apporter ses
quatre amis. Le premier est comme son frère, mais il n’a pas revu les trois autres
depuis quarante ans. Le vent fouette son visage ; les mouettes crient ; le jour
décline. Lours’ est-il toujours une force de la nature ? Luce est-elle toujours aussi
folle ? Mara ressemble-t-elle encore à celle qui l’avait ensorcelé, autrefois? Et
lui-même, comment sera-t-il à leurs yeux ?"
Jean-Claude Mourlevat a été professeur d’allemand, comédien de théâtre, clown, metteur en scène (de pièces de Brecht, Cocteau ou Shakespeare) et traducteur. Depuis une vingtaine d’années, il publie des ouvrages pour la jeunesse. Sa plume fait rire, réfléchir ou rêver, et a exploré tous les genres, du conte au récit humoristique, et du roman d’aventure épique à la science-fiction. Depuis 2015, il élargit avec bonheur son lectorat en publiant Et je danse aussi (avec Anne-Laure Bondoux). Mes amis devenus est son dernier roman parut aux éditions Fleuve.
Mes amis devenus est un roman rétroviseur. Il appartient à cette catégorie de roman qui pose un regard nostalgique et bienveillant sur l’enfance, l’adolescence de personnages devenus âgés. Ils sont cinq, unis comme les doigts d’une main : Silvère, Jean, Luce, Lours’ et Mara. A la faveur d’un week-end sur une l’île d’Ouessant, tourmentée par les vents et baignée par le bleu, ces cinq amis de lycée, vont se retrouver, renouer un lien qui n’a finalement jamais disparu, comme si l’enfance et l’adolescence posaient à jamais les liens adultes. En attendant l’arrivée du ferry qui les réunira, Silvère rêve de son enfance et fait le point sur sa vie.
» Naviguer vers une île, même si c’est pour un simple saut de puce, me remplit d’allégresse, sans doute parce que je suis un enfant de l’intérieur des terres, et que rien ne m’est aussi exotique, rien ne me parle autant de liberté que le grondement sourd d’une moteur de bateau, le vent marin et le cri des mouettes. »
Jean-Claude Mourlevat fait preuve d’humour et de légèreté tant dans la construction du roman, qui alterne entre des flashbacks et des chapitres au temps présent, que dans l’intitulé des chapitres qui constitue une sorte de petite énigme que seule la lecture du chapitre saura éclairer.
« Sur ce bateau dont la coque bleue se précise et que les mouettes suivent en criant, il y a donc Jean, mais il y a aussi Mara. Je vais la revoir et cela me semble surnaturel, puisque après avoir disparue de ma vue et de ma vie, cette année lointaine où je l’ai perdue, elle est entrée dans mon imaginaire avec le quasi-statut d’un personnage de fiction. »
Le narrateur, Silvère est écrivain, façon habile de mettre en abîme le rôle de l’auteur et questionner le sens de l’écrit. Cela fonctionne plutôt pas mal.
« Les critiques parlent parfois de moi comme d’un écrivain plein d’humanité. Savent -ils que ce jour-là j’ai été à deux doigts d’écraser sur la table de sa cuisine la tête d’une vieille personne ? »
A noter, le titre est emprunté à un poème de Ruteboeuf, un poète du XIIIe siècle, repris ici par Joan Baez.
Ce roman doux invite à l’introspection à interroger nos vies passées. J’ai aimé sa construction et son optimisme. L’amitié prend des lettres de noblesse sous la plume de Jean-Claude Mourlevat.
Jean-Claude Mourlevat, Mes amis devenus, Fleuve édition, mai 2016, 224 pages, 17.90 euros