Anaïs Llobet : « Les mains lâchées »

Les Mains Lachees

Présentation de l'éditeur : "Une vague monstrueuse, soulevée par un typhon meurtrier, dévaste 
les Philippines en quelques minutes et ravage sa myriade d’îles.
Sur l’une d’elles, Madel reprend connaissance, seule au milieu du chaos. Jan, l’homme qu’elle 
aime, a disparu. Et elle a lâché la main de l’enfant qu’il lui avait confié.
Au prix d’une difficile anesthésie des sentiments, la jeune journaliste se plonge dans son 
travail, en équilibre entre information et voyeurisme, quand tous les médias du monde se tournent 
vers les Philippines.
Recueillir la parole survivante, nouer des liens avec les rescapés, c’est conjurer la mort. 
Mais un typhon de cette violence ne laisse jamais en paix ceux qu’il a épargnés."

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Anaïs LLobet est journaliste pour l’AFP. Elle a parcouru le monde et vit actuellement à Moscou. Son premier roman Les mains lâchées se déroule aux Philippines, bien loin d’une ambiance de carte de postale.

Un typhon s’abat sur les Philippines suivi de près par un tsunami qui emporte tout et cause des milliers de morts. Ce sont les faits. Anaïs Llobet s’en empare non pas comme une simple témoin ou comme une journaliste dévouée mais comme une personne qui doute et cherche un sens à tout ça.

« Le silence des hommes me fait frissonner, il n’y a que la mer qui parle encore à Tacloban. »

La narratrice, Madel, une journaliste débrouillarde, intègre et animée par la recherche d’une info pertinente fait penser à l’auteure du roman. S’il y a une part d’autofiction dans ce roman, elle est largement digeste car les personnages sont terriblement incarnés, sentis, tout comme la nature. Les effets de réel sont surement encore plus réel pour ceux qui ont vécu une telle catastrophe naturelle.

Madel a perdu Jan, l’enfant du pays, son amoureux, mais elle a aussi la lâchée la main d’un jeune garçon dont elle avait la charge. Au milieu de cette catastrophe, alors que les repères se brouillent, que tout manque (ressources humaines, ressources matérielles et espoir), une femme tente de faire les bons choix et de ne pas sombrer.

« Voilà, c’est ça, le fond de l’horreur. Cette petite flamme d’espoir qui vous lacère le cœur et n’en finit pas de vous ronger l’âme. Et quand on décide de l’éteindre, en la pinçant de nos deux doigts, c’est au prix d’une brûlure qui ne nous quittera jamais. La brûlure de l’oubli. »

Poésie et fluidité de lecture sont les deux qualités de ce roman qui évite l’écueil du larmoyant. C’est un hommage digne à ces inconnus qui deviennent des bayanis (héros en philippin) par nécessité mais aussi par dévouement et richesse de cœur. L’alternance du récit de Madel et de témoignages de rescapés donnent corps et cœur à ce roman.

Bien sûr, ce roman est aussi le prétexte pour aborder la question du traitement de l’information lors d’une catastrophe naturelle. Faire de l’audience, alerter l’opinion par des images fortes, faire des choix d’images et d’histoires sont autant d’aspects du journalisme que la romancière questionne.

« Pour Irene, Yolanda est une énième mission. Pour moi, c’est une peur où s’envasent mes pensées, un deuil où s’enlise le temps. »

J’ai aimé la fluidité de lecture qui dégage de ces pages à la fois émouvantes et dures. J’ai été touchée et bousculée par ce roman qui non seulement rend hommage à peuple digne mais qui questionne aussi sur la place et le poids des médias lors qu’une catastrophe naturelle. J’espère lire très vite le deuxième roman d’Anaïs LLobet.

Anaïs LLobet, Les mains lâchées, Plon, août 2016, pages, 16 euros

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6 commentaires sur « Anaïs Llobet : « Les mains lâchées » »

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