Belinda Cannone a publié de nombreux essais. Le dernier S’émerveiller m’a beaucoup touchée car il invite à faire de chaque jour un fête. Si tout n’est jamais que question de regard, elle ouvre la voie à une réflexion intime sur le chemin que l’on souhaite emprunter. Merci à elle d’avoir répondue à mes questions.
- Comment êtes-vous venu(e) à l’écriture? D’où vous en vient l’envie?
Il me semble qu’elle vient de l’enfance lointaine, quand mon père m’a acheté un grand cahier en guise de journal, en me disant, « Ecris, sinon tu oublieras ». Depuis ce moment, vers 9 ou 10 ans, l’envie d’écrire s’est installée en moi, comme je l’ai raconté dans L’Ecriture du désir, mais silencieusement – je veux dire que je ne me suis pas dit « Je vais devenir écrivain ». Maintenant, si j’analyse mieux, je crois que j’ai souhaité écrire pour combattre la violence du monde, pour essayer de la comprendre, d’en faire quelque chose – sinon elle était intolérable.
- Quel est votre plus beau souvenir d’auteur?
J’ai plusieurs magnifiques souvenirs de rencontre avec des lecteurs inconnus. C’est une grande joie de rencontrer quelqu’un qui se met à vous parler de vos livres, à vous dire qu’il les aime, comment il les comprend. C’est comme un cadeau de la vie (et de la littérature).
- Que pensez-vous de cette citation de Fernando Pessoa « La littérature est la preuve que la vie ne suffit pas »?
Ah, j’y pense souvent à cette citation. Je ne sais si elle est complètement exacte. La vie ne suffit jamais, à personne. Nous cherchons tous (je crois) des moyens de l’intensifier. Pour arriver à la « vie haute » (haute : comme dans « haute tension »). Pour moi, deux grands moyens sont à ma disposition : aimer et écrire. Mais on peut entendre cette citation d’autres manières. Par exemple : la littérature existe pour expliquer mieux la vie, parce que la vivre simplement ne suffit pas pour la comprendre. Alors la littérature est comme un miroir dans lequel réfléchir (aux deux sens du terme) la vie.
- Quel livre aimez-vous offrir?
J’aime particulièrement le livre de Jose Saramago, L’année de la mort de Ricardo Reis. Mais il doit y en avoir d’autres… Par exemple, Mon nom est rouge, d’Ohran Pamuck,
- Quels sont vos projets littéraires?
Je vais écrire un essai (à ma manière) sur le tango. Dire ce que représente l’expérience de la danse, et de cette danse en particulier, comment elle est liée à la joie, comment elle crée une relation miraculeuse – une connivence – avec les partenaires de danse. Ensuite je passerai à un roman que je mijote depuis longtemps mais… chut, c’est un secret.
- Y a-t-il une question que je ne vous ai pas posé à laquelle vous auriez aimé répondre? Souhaitez-vous ajouter quelque chose?
Vous savez, il y a mille questions en suspens entre nous…
- J’allais oublier… avez-vous un secret à nous confier?
Oui, écoutez : le monde est en équilibre, mais un équilibre précaire entre les forces négatives et les positives. A chacun de contribuer au maintien de cet état. Nous sommes responsables, chacun, tous, de l’état du monde. Prenons garde à lui.